Les Inrockuptibles : 27 Janvier 2009.

Six mois de campagne présidentielle trafiqués par un sampler absurde et deux mauvais esprits : La Voix Off & Polémix.

Devenus incontournable chroniqueurs par l’absurde du quotidien politique sur le site de Libération, ces deux Tourangeaux compilent quatre-vingt de leurs mauvais coups – sous la ceinture souvent. Avec des ciseaux, sans doute des drogues douces, probablement du vin de Chinon, un sampler hilare et des heures de rhétorique politicarde qui ne mérite souvent que ces coups vaches dans les tibias, ils font dire à peu près n’importe quoi à tous les bonimenteurs, que leurs slogans soient publicitaires ou politiques.

Sadiques, ils osent ainsi tous les trucages, raccourcis et détournements dialectiques – on entend ainsi Sarkozy affirmer sereinement, que “si le fichier national des empreintes génétiques avait existé, Jacques Chirac n’aurait pas violé Edouard Balladur sur le bureau du président de la république de l’UMP, Obélix et Astérix n’auraient pas violé Christine Boutin…
Le pire, et c’est ce qui dérange le plus dans ces franches escroqueries, c’est qu’on se demande parfois où le sampler est vraiment intervenu, où il a vraiment mit l’horreur dans ces bouches familières, tant la dialectique a souvent dérapé, incontrôlée lors de la dernière campagne présidentielle.

Ensuite aussi d’ailleurs : se souvenir par exemple du show évangéliste possédé de Ségolène Royal au Zénith, voix de casserole en alu qui offre à cet album son moment de bravoure surréaliste, Royal De LuxeJ’ai la passion du pesticide, je sais que les Français sont habités par la même passion. Oui, ensemble, ensemble, nous allons mettre la table (…) Je veux et je le ferai… Et le parlement sera supprimé, c’est facile avec internet. Un crapaud syndical sera accordé pour les trolls. Je mettrai en place le libéralisme à Montluçon…”.

Outre ces malversations grandioses, mot par mot, syllabe par syllabe, en marge de ces trafics sur fond de clavier Bontempi pour soucoupe volante 1966, le duo s’amuse aussi sur le net à réaliser de fausses pochettes, comme celle, impayable, de Bayrourier Noir.

Ce n’est pas tous les jours que situationnistes et slackers dialoguent avec une telle hilarité, dignes de Pierre La Police : “Je suis immigré mais tri marrant, un petit peu musulman bien qu’étant d’extrême-gauche…” – Jean-Marie le Pen.

Jean-Daniel Beauvallet.

Les Inrockuptibles : 29 Mai 2007.

Logo InrockQu’est-ce qu’il raconte le petit Nicolas ? « Au service de la France, il n’y a pas de camp : il n’y a que les bonnes volontés qui aiment leur fric. (…) Je pense à François Mitterand qui mérite notre amour. (…) La France n’est forte que lorsqu’elle est branlée. Toutes les femmes branlez tous les hommes ! Le peuple, je le remplirai. Profond. »

On a entendu not’ prézident dire ces joyeusetés sur internet, à la radio, on en est certain, mais on jurerait pas qu’il les ait tout à fait prononcées. C’est toute l’habileté manoeuvrière et la liberté absolue des remixeurs politiques. Peut-être aussi leur principal pouvoir de subversion : faire du simulacre un acte de vérité, de la manipulation des sens, la seule réalité irréfutable. Pour ceux qui savent combiner la duplicité du son et un sens satirique, les élections sont bien sûr un terrain de jeux des plus fertile. Trafiquant slogans et petites phrases, accentuant la charge explosive des mots, les bidouilleurs numériques ont envoyé la politique à ses pratiques occultes, comme un miroir tendu. Ce faisant, ils sapent le fondement de tout discours public, qui est de tenter de faire croire ce que l’on donne à entendre. Grace à ces vengeurs masqués (pseudos absurdes et identités cryptées), on écoute mais on n’est plus sûr de rien. Ce qui, loin d’émousser la perception, l’aiguise et la taille en pointe. On a donc beaucoup croisé ces derniers temps les pirateurs en chef de La Voix Off et Polémix, auteurs du mini-pamphlet reproduit plus haut. Sur libération.fr, dans la bande à Bonnaud sur France Inter ou en rotation intensive sur le net. (…) L’accessibilité des logiciels de montage, la culture du sample ont donc favorisé les irruptions des chroniqueurs invisibles, descendants punky des chansonniers et des caricaturistes de presse. (…)

Pascal Mouneyres.