5 Avril 2006. Reportage : Thomas Chauvineau.
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20 Juin 2007. On les avait pourtant prévenus !
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Les politiques au mixeur
« Les Déformations de 20h00« , Dimanche 20h00 sur Radio Nova.
Sans complexe, ils pratiquent la « caricature tranquille« . Chaque dimanche, à l’heure où les chaînes de télé déversent au fil de leur JT un discours politique très officiel, Polémix et La Voix Off – avec DJ Flashball – répandent un tombereau d’impertinences sur les ondes de Nova. Ces as du mix et du remix triturent les petites phrases des hommes et des femmes politiques, les coupent et les recollent pour leur faire dire n’importe quoi. Pendant une heure, leur émission « iconoclaste et hirsute » enfile les perles artificielles, parfois montées de manière grossière et repérable, parfois assemblées avec tant de souplesse qu’on les croirait vraies. « Nous voulons créer une chambre médiatique absurde » précise La Voix Off. L’animateur dit vivre 24 heures sur 24 avec télé et radio allumées, un doigt sur la touche « pause » et un autre sur la touche « record ».
Le résultat ? Des pastilles satiriques travaillées et un tapis musical électro parsemé de saisies verbales. On n’entend ainsi Nicolas Sarkozy, lors de la « Sarkorétro » – pour fêter ses deux ans de mandat présidentiel – aligner des phrases réjouissantes. « Je voudrais que soit autorisé sans condition le consensus de la pensée unique, mais dans le climat actuel du marché publicitaire« , assène ainsi le Président de la République. Qu’on entend peu après hésiter, et lâcher un « Groumpf » agacé. Ségolène Royal, elle se dit « très pénible« , tout en assurant que « ce qui est important, c’est le futur de l’avenir« .
La séquence « 1 minute pour convaincre » (animée par Alain Béchamel et Olivier Casserole, en hommage piquant à Alain Duhamel et Olivier Mazerolle), permet d’entendre le « Premier Sinistre » François Fillon dérouler sérieusement une énormité : « Il est normal que les gens qui gagnent beaucoup d’argent niquent les plus défavorisés. » On sourit, mais on réfléchit aussi à la construction du discours politique, dont les mécanismes transparaissent au delà de la pochade.
Laurence Le Saux
Photo : Rakaille Le Rouge
Six mois de campagne présidentielle trafiqués par un sampler absurde et deux mauvais esprits : La Voix Off & Polémix.
Devenus incontournable chroniqueurs par l’absurde du quotidien politique sur le site de Libération, ces deux Tourangeaux compilent quatre-vingt de leurs mauvais coups – sous la ceinture souvent. Avec des ciseaux, sans doute des drogues douces, probablement du vin de Chinon, un sampler hilare et des heures de rhétorique politicarde qui ne mérite souvent que ces coups vaches dans les tibias, ils font dire à peu près n’importe quoi à tous les bonimenteurs, que leurs slogans soient publicitaires ou politiques.
Sadiques, ils osent ainsi tous les trucages, raccourcis et détournements dialectiques – on entend ainsi Sarkozy affirmer sereinement, que “si le fichier national des empreintes génétiques avait existé, Jacques Chirac n’aurait pas violé Edouard Balladur sur le bureau du président de la république de l’UMP, Obélix et Astérix n’auraient pas violé Christine Boutin…”
Le pire, et c’est ce qui dérange le plus dans ces franches escroqueries, c’est qu’on se demande parfois où le sampler est vraiment intervenu, où il a vraiment mit l’horreur dans ces bouches familières, tant la dialectique a souvent dérapé, incontrôlée lors de la dernière campagne présidentielle.
Ensuite aussi d’ailleurs : se souvenir par exemple du show évangéliste possédé de Ségolène Royal au Zénith, voix de casserole en alu qui offre à cet album son moment de bravoure surréaliste, Royal De Luxe “J’ai la passion du pesticide, je sais que les Français sont habités par la même passion. Oui, ensemble, ensemble, nous allons mettre la table (…) Je veux et je le ferai… Et le parlement sera supprimé, c’est facile avec internet. Un crapaud syndical sera accordé pour les trolls. Je mettrai en place le libéralisme à Montluçon…”.
Outre ces malversations grandioses, mot par mot, syllabe par syllabe, en marge de ces trafics sur fond de clavier Bontempi pour soucoupe volante 1966, le duo s’amuse aussi sur le net à réaliser de fausses pochettes, comme celle, impayable, de Bayrourier Noir.
Ce n’est pas tous les jours que situationnistes et slackers dialoguent avec une telle hilarité, dignes de Pierre La Police : “Je suis immigré mais tri marrant, un petit peu musulman bien qu’étant d’extrême-gauche…” – Jean-Marie le Pen.
Jean-Daniel Beauvallet.
Qu’est-ce qu’il raconte le petit Nicolas ? « Au service de la France, il n’y a pas de camp : il n’y a que les bonnes volontés qui aiment leur fric. (…) Je pense à François Mitterand qui mérite notre amour. (…) La France n’est forte que lorsqu’elle est branlée. Toutes les femmes branlez tous les hommes ! Le peuple, je le remplirai. Profond. »
On a entendu not’ prézident dire ces joyeusetés sur internet, à la radio, on en est certain, mais on jurerait pas qu’il les ait tout à fait prononcées. C’est toute l’habileté manoeuvrière et la liberté absolue des remixeurs politiques. Peut-être aussi leur principal pouvoir de subversion : faire du simulacre un acte de vérité, de la manipulation des sens, la seule réalité irréfutable. Pour ceux qui savent combiner la duplicité du son et un sens satirique, les élections sont bien sûr un terrain de jeux des plus fertile. Trafiquant slogans et petites phrases, accentuant la charge explosive des mots, les bidouilleurs numériques ont envoyé la politique à ses pratiques occultes, comme un miroir tendu. Ce faisant, ils sapent le fondement de tout discours public, qui est de tenter de faire croire ce que l’on donne à entendre. Grace à ces vengeurs masqués (pseudos absurdes et identités cryptées), on écoute mais on n’est plus sûr de rien. Ce qui, loin d’émousser la perception, l’aiguise et la taille en pointe. On a donc beaucoup croisé ces derniers temps les pirateurs en chef de La Voix Off et Polémix, auteurs du mini-pamphlet reproduit plus haut. Sur libération.fr, dans la bande à Bonnaud sur France Inter ou en rotation intensive sur le net. (…) L’accessibilité des logiciels de montage, la culture du sample ont donc favorisé les irruptions des chroniqueurs invisibles, descendants punky des chansonniers et des caricaturistes de presse. (…)
Pascal Mouneyres.